30 min chrono par étudiant.es : la durée des leçons m’a tuée [1] . Ou plutôt non, seulement blessée. Laissez-moi là, avec un revolver et une bouteille de whisky, la nuit va tomber, vous n’avez pas de temps à perdre. D’ailleurs, je dois rester jusqu’à la fin de la semaine pour savoir ce que c’est que cet échange Erasmus, hors son nom.
Le chronomètre qui s’affole donne l’illusion qu’il faut agir vite et beaucoup, régler les scènes, mettre en ordre ces immenses pièces de répertoire… On met la poussière sous le tapis, on fait des piles de tout ce qui nous dérange… Surtout, on présuppose avec aplomb l’apparence finale de cette pièce. Ce qui évacue une bonne fois pour toutes la variable catastrophique et merveilleuse de l’élève en face de moi.
Je ne fais plus ça. Je ne sais pas quand j’ai arrêté de faire ça, mais ici, ce matin, je me suis souvenue que j’avais arrêté un jour. La tentation de recommencer a tiré comme une vieille cicatrice. Depuis, la question me taraude : quand est-ce que j’ai arrêté de régler des scènes, comme on remonte des mécanismes ? Quand est-ce que j’ai arrêté de savoir d’avance ? Ou pour le dire autrement : quand ai-je commencé à travailler ? — Si quelqu’un lit ces notes, c’est un appel à témoins — .
Donc, aujourd’hui encore, pas de grand ménage de printemps, ni Carmen qui lave plus blanc, ni Louise proprette. Les pièces encombrées de préjugés, de confusion, d’à peu près, de certitudes, de désintérêt, d’inertie… je les ai laissées telles quelles. Dans le peu de temps qui nous était imparti, je me suis contentée — parfois à l’issue de 28 minutes de réflexion — d’ouvrir une fenêtre, ou de déplacer une chaise, de dépoussiérer un tout petit bibelot, ou encore de montrer un outil très ancien et très simple que j’avais avec moi et qui serait fort utile pour faire quelque chose dans cette pièce, une autre fois.
[1] En échange ERASMUS pour une semaine à la Staatliche Hochschule für Musik und Darstellende Kunst de Stuttgart, tandis que ma collègue Kornelia Repschläger donne cours au CNSMDP.
[1] En échange ERASMUS pour une semaine à la Staatliche Hochschule für Musik und Darstellende Kunst de Stuttgart, tandis que ma collègue Kornelia Repschläger donne cours au CNSMDP.